Articles de thierry-mariedelaunois
Dans Partage II
Auteurs, écrivains, les admirer ou les craindre?, une publication de Thierry-Marie Delaunois
Il écrit des fictions, le voisin de palier, est-il pour cela un auteur ou un écrivain? Chacun a sa conception et l'usage de ces deux termes n'échappe jamais à la controverse. Pour Jean Guenot par exemple, auteur de "Ecrire, guide pratique de l'écrivain", éd. Guenot, 1998, l'écrivain est tout bonnement celui qui écrit (l'artisan scripteur) tandis que l'auteur endosse une fonction socioculturelle. Jean-Marie Bouvaist, spécialiste des métiers du livre, identifie lui aussi l'écrivain comme un "artisan de la langue écrite", voire un "artiste".
Pour Valéry, l'écrivain supplante l'auteur car un sacerdoce le lie à son art: "Un auteur, même du plus haut talent, connût-il le plus grand succès, n'est pas nécessairement un écrivain." Et après? Plus prosaïquement, on convient souvent de désigner par écrivain une personne dont la profession ou le revenu principal réside dans l'écriture de livres, le Robert quant à lui posant spécifiquement l'écrivain comme celui "qui compose des ouvrages littéraires", excluant de ce fait les autres genres d'écriture comme la non-fiction. Enfin bref...
Les admirer ou les craindre? Stupéfiant qu'au départ d'une simple idée puisse naître une oeuvre littéraire de plus de 300 pages ou qu'à partir d'un banal fait divers l'on puisse aboutir à l'éclosion d'une saga à rebondissements multiples! Toucher le fond, atteindre le plus profond désespoir peut aussi mener à un déclic salvateur, à une réelle libération; l'écriture jouera alors un rôle de baume, même davantage. Les ingrédients parsemés sur la route? L'inspiration souvent liée à un certain état d'esprit, une imagination débordante, une thématique accrocheuse, voire percutante, le naturel et l'originalité, un sens de la narration, avoir de la plume, du style et surtout un éditeur enthousiaste; s'ajoutent à cela l'endurance et la persévérance car de l'idée au livre, le chemin est long et parfois semé d'embûches.
Quant à la réussite de l'ouvrage, elle est relativement aléatoire car dépendante de l'éditeur, de l'auteur lui-même - s'il s'implique ou pas dans la promotion - , des libraires et de la presse. Le meilleur coup de pouce, ce serait l'obtention de l'un de ces prestigieux prix littéraires si convoités: les ventes décolleraient, l'écrivain se faisant au passage un nom dont se rappellerait le public à la parution suivante. Ecrivains, auteurs, une espèce en voie de disparition? Loin de là manifestement!
Les admirer? Pour leur imagination, leur créativité, leur style souvent épuré, leurs connaissances non négligeables de la langue, une narration efficace, élaborée, ce savant mélange de réalité et de fiction qu'ils parviennent à nous concocter, la psychologie fouillée de leurs personnages qui les fait sortir de l'ordinaire, et n'oublions point le charisme de l'écrivain lié à sa personnalité de "créateur". L'image joue bien sûr son rôle.
Les craindre? Pour leur utilisation de la réalité - ils la déforment parfois -, et des autres dans leurs récits même si les noms sont changés, pour leur humour à l'occasion corrosif et lapidaire, le verbe haut et des fois sans tabou, les secrets dévoilés, leurs jugements allant parfois jusqu'à la dénonciation. Le droit à l'expression? Pas partout sur terre d'où une crainte à leur égard parfois justifiée. L'écrivain? Un être vivant qui pense, médite, cogite jusqu'à ce que le fruit de leurs réflexions se métamorphose en mots. Un danger public? Chacun son opinion! Les admirer ou les craindre en fin de compte?
Le livre se vend toujours, on continue à lire Schmitt, Musso, Pennac, Delacourt et bien d'autres, on court les séances de dédicaces, les associations d'écrivains et autres cercles d'auteurs honorent l'écrit, les blogs littéraires pullulent, l'écriture est bien présente sur la toile, les Salons et Foires du Livre sont toujours fréquentés, ce qui signifie que la littérature - une certaine littérature du moins - est loin d'être morte. Conclusion? Les écrivains et auteurs véhiculent des messages; ils sont des passeurs d'idées au travers de leurs ouvrages, donc utiles et même indispensables dans notre société actuelle très centrée sur le chiffre, le nombre, c'est pourquoi adoptons-les, aimons-les, continuons à les suivre et accordons leur du crédit. Vivre de leur plume? Il faut être fort pour sortir du lot et se faire remarquer; quant à les jalouser, c'est de ce monde, certains succès paraissant parfois discutables, injustifiés...
Un bel exemple d'oeuvre littéraire de qualité parue récemment d'une auteure injustement méconnue? Donnons deux titres avec deux thématiques bien distinctes: "Le secret de MONALISA" de Murielle Lona et "Le Spectateur" de Virginie Vanos. A découvrir absolument!
Dans Partage II
L'invisible: le puzzle de vie, par Thierry-Marie Delaunois écrivain et critique