Dôme de Stephen King lu par Thierry-Marie Delaunois
Dôme de Stephen King lu par Thierry-Marie Delaunois
"Toutes les aiguilles des instruments de contrôle s'immobilisèrent net. "Qu'est-ce que...? dit Claudie Sanders. Elle se tourna vers Chuck; elle avait les yeux écarquillés, mais on n'y lisait pas de panique, seulement de la stupéfaction. Elle n'eut pas le temps d'avoir peur. Chuck ne vit même pas le tableau de bord. Ce qu'il vit, ce fut le nez du Seneca lui foncer dessus. Puis les deux hélices se désintégrèrent. Il n'eut pas le temps d'en voir davantage. Plus de temps du tout." Mais...qu'aurait-il pu voir? Et cela en aurait-il valu la peine? Que s'était-il passé?
Un matin d'automne, le Maine, Chester's Mill, petite ville brutalement isolée du reste du monde par un champs de force, du moins en apparence, comme si un globe ou un dôme de verre s'était subitement abattu. Personne ne comprend; l'armée se révèle impuissante à ouvrir un passage au travers; les ressources bientôt commencent à se raréfier; Jim Rennie, premier adjoint, voit tout de suite le bénéfice qu'il peut tirer d'une telle situation: un nouvel ordre social s'établit alors mais la résistance s'organise progressivement autour de Dale Barbara, chef cuistot mais vétéran d'Irak...
"Allégorie du totalitarisme, réflexion sur la nature humaine et sa résistance aux situations extrêmes, et page-turner irrésistible" selon Clémentine Goldszal (Elle), "Dôme", c'est en Livre de Poche plus de 1500 pages en deux tomes, un roman-cocktail de science-fiction et d'horreur signé Stephen King, auteur à succès né en 1947 (Carrie,...), pseudo: Richard Bachman, ayant obtenu aux Etats-Unis quelques distinctions. Un grand roman, bien ficelé, émouvant, sur l'honneur d'être homme entre autres; "Dôme", c'est également une singulière parabole écolo-politique émaillée de clins d'oeil, numéro trois au palmarès des romans les plus consistants de Stephen King.
Malgré de petits défauts de traduction et un certain sentimentalisme sur la fin, on reconnaît bien là King, son savoir-faire et son style impliquant le lecteur dans le récit d'une manière originale: son oeuvre, dense, très narrative, se trouve ponctuée de pensées, celles de King et de ses personnages, parfois très terre-à-terre mais qui font souvent mouche; l'on n'hésite pas à tourner rapidement les pages, l'auteur prenant un malin plaisir à nous annoncer ce qui nous attend mais de manière abstraite. De la grande littérature? C'est selon: on aime ou pas, on accroche ou pas, chacun ses goûts, cela dépend de ce que l'on recherche; dans le cas présent, si l'on aime les histoires fortes et plutôt stressantes, il faut consommer ce King, rejoindre Chester's Mill, où Dale Barbara, Rose Twitchell, propriétaire du snack, Howard Perkins, chef de la police, Linda Everett, officier de police, se débattent pour pouvoir respirer, s'en sortir, et c'est sans compter sur l'audace de Julia Shumway, propriétaire et rédactrice en chef du journal local "The Democrat".
Tous coincés pour l'éternité sous ce dôme infernal? Peut-on le survoler sans risques? "Le Seneca explosa au-dessus de la route 119 et retomba en pluie de feu dans le paysage. Il y avait aussi des fragments de corps dans cette pluie. Un avant-bras fumant - celui de Claudette - atterrit avec un bruit sourd à côté de la marmotte impeccablement coupée en deux." Faute au dôme? D'où provient-il? Jim Rennie va-t-il parvenir à asseoir son autorité? Du King, élaboré, puissant, parfois émouvant, une narration quasi continue. Qui aime Stephen considérera "Dôme" comme son grand retour. La traduction française du roman est parue en 2011. Note complémentaire: pour lecteurs avertis et non impressionnables. Oui, j'ai survécu...mais si vous saviez! Juste parfois un petit manque d'air pur...et encore...